Le Pont de la Rivière Kwai
Kanchanaburi
Notre balade à travers la Thaïlande nous amène à Kanchanaburi, cette bien belle région que j'apprécie énormément, avec ses montagnes environnantes, ses vallées, ses rivières, ses champs de cultures, ses rizières splendides.
J'avais comme idée de faire cette balade en train au milieu des montagnes en longeant la fameuse rivière Kwai, depuis Kanchanaburi jusqu’au terminus de la ligne à savoir, la petite station de Nam Tok.
Cette ligne traditionnellement appelée le «Train de la Mort» vous amène au bout de quelques kilomètres sur un site chargé d'histoire... vous saurez rapidement en découvrant les images qui suivent l'explication de ce titre assez intiguant... voire choquant.
Etape par étape, je vais vous présenter ici comment nous avons découvert ce lieu hautement touristique, et donc très fréquenté par les touristes du monde entier.
La pont de la rivière Kwai à Kanchanaburi de nos jours, n'a rien à voir avec la photo ci-dessus qui était extraite du célèbre film de David Lean (1957).
Gare de Kanchanaburi
Vous avez deux façons de prendre le train à Kanchanaburi. Evidemment, si vous voyagez par vos propres moyens c'est à dire comme nous, en famille et en voiture...le mieux est de prendre votre billet et choisir votre place dans un wagon à la petite gare de la ville...
Si vous êtes en groupe, vous n'aurez pas cette facilité et vous devrez suivre le mouvement collectif, cela va de soi. Il y aura de fortes chances que vous embarquiez à bord de ce train à la petite station située tout proche du pont... mais ceci est un petit détail.
Très vite, nous découvrons une rame prête à démarrer. Le train est très ancien (il doit dater des années 50), les fenêtres sont ouvertes et la seule "climatisation" se limite à des ventilateurs accrochés au plafond.
L'intérieur est très propre, impeccable !
Arrêt à la station juste avant le Pont
C'est surtout ici, à la petite station juste avant le pont, que l'affluence se fait bien sentir... en quelques secondes les wagons se remplissent de groupes de touristes...
Toutes les fenêtres sont ouvertes, et les ventilateurs accrochés au plafond marchent à fond et brassent l'air chaud... ça promet ! Si le train paraît vraiment vieux, en tout cas il est propre et bien entretenu.
Les vendeurs de pancake et de boissons raffraichissantes passent toutes les cinq minutes pour la plus grande joie des touristes...
La plupart du temps, ce sont des dizaines de badauds qui marchent sur cette ossature métallique pour se faire prendre en photo (je l'ai fait aussi...)
Laissant derrière nous Kanchanaburi et ses différents mémoriaux, nous traversons à petite allure, la campagne locale qui ressemble à toutes les campagnes de Thaïlande... le train ne doit pas dépasser les 50km/h...
Se balançant tranquillement, avec un bruit caractéristique de vieux train d'antan qui me rappelle mes tendres années, nous nous approchons des fenêtres, le visage carrément dehors car la chaleur à l'intérieur est assez pesante pour des gens qui n'ont pas l'habitude...
Le train avance à un petit 50 à l'heure. A fond... il doit atteindre 60km/h... mais vu son état d'ancienneté, je n'aimerais pas de toute façon aller plus vite...et puis... nous avons tout notre temps.
De nombreuses excursions sont possibles dans la région, des cascades magnifiques, des balad
Le Train de la Mort
A environ 45km depuis notre départ, nous atteignons: Thamkrasae Bridge.
J'avais vraiment envie de voir de près ce viaduc, car dans le train je ne ressentais pas grand chose de vraiment émouvant. Certes, les vues panoramiques étaient très belles à contempler, mais il m'en fallait plus: nous décidions d'aller à pied voir de plus près les détails de cette construction.
Le texte (en fin d'article: "La tragédie du pont de la rivière Kwaï" ) que j'ai découvert récemment met vraiment l'accent sur la différence entre ce que nous montre le film américain et ce que fut la dure réalité.
A la vue de ces poutres de bois énormes, denses, dures, extrêment lourdes, servant à construire cette ligne dans un endroit si sauvage, infesté de serpents, de moustiques et autres bestioles (crocodiles? tigres?), avec aussi des pentes abruptes entre falaise et rivière, j'ignore si on peut arriver à imaginer la souffrance de tous ces prisonniers suffoquant, dans cette chaleur humide, se blessant, tombant malades, vivant dans des conditions inhumaines, et obtenant tout juste un bol de riz à la fin de leur journée... et probablement très peu de soins... l'horreur absolue!
Plus de 90.000 prisonniers sont ainsi morts ici d'épuisement et de maladie, de quoi avoir une pensée vraiment émue et triste.
En tout cas, lorsque j'ai découvert cette structure incroyable (qui pourrait paraître presque courante de nos jours avec tous les moyens technique que possèdent les entreprises de constructions) j'étais vraiment méditatif, contemplatif, bouleversé.
Une chose est sûre, cette visite ne fut pas une balade... mais bien une découverte bouleversante.
Nam Tok, terminus
Le cimetière Militaire à Kanchanaburi
Le terrain sur lequel se trouve ce cimetière est un don du peuple thaïlandais pour le repos perpétuel des marins, des soldats et des aviateurs qui sont honorés ici.
De nos jours...
Le Train sur Google
Sur la carte
La tragédie du pont de la rivière Kwaï
«Qui ne travaillera pas, ne mangera pas. (...) Beaucoup d’entre vous ne reverront jamais leur foyer. Nous construirons la ligne, même si nous avons à la faire passer sur le corps de l’homme blanc.» Pas vraiment engageant, le discours du lieutenant-colonel japonais Nagatomo Yoshitada, adressé en été 1942 aux prisonniers de guerre occidentaux mobilisés dans la contruction de la voie ferrée Bangkok – Rangoon !
La réalité s’est avérée pire encore: en seize mois de chantier, plus de 90 000 travailleurs forcés ont perdu la vie sur les 415 kilomètres de ce «chemin de fer de la mort» longeant la rivière Kwaï. Les coolies asiatiques ont payé le plus large tribut, mais au moins 12 400 soldats et officiers britanniques, australiens, néerlandais et américains ont aussi péri dans ce voyage au bout de l’enfer.
Bien pire que le film
On est loin de la célèbre fiction aux sept Oscars, Le pont de la rivière Kwaï, que le réalisateur David Lean a adaptée en 1957 d’un roman de l’écrivain français Pierre Boulle, ancien résistant et agent des Services secrets britanniques en Asie du Sud-Est.
Le pont mythique, situé à Kanchanaburi, a bien été édifié par une main-d’œuvre de prisonniers occidentaux et asiatiques, comme le raconte le long-métrage britannico-américain. Mais «leurs conditions étaient bien pires que celles décrites dans ce film»*, souligne l’interprète Nagase Takashi, présent à l’époque sur le chantier du chemin de fer thaï.
«Le film est une fiction totale qui idéalise complètement la conduite des prisonniers britanniques»**, renchérit le lieutenant japonais Abe Hiroshi, qui dirigeait un camp de travail et a été condamné pour crime de guerre. En réalité, les forçats anglais n’ont pas apporté leur savoir-faire à la construction du pont. Ils n’ont pas non plus fait sauter l’ouvrage d’art. Le pont n’a été bombardé que plus tard par les forces alliées. Reconstruit par les Japonais au titre des dommages de guerre, il existe toujours et est très visité par les touristes.
L’enfer de la jungle
Très édulcoré, Le pont de la rivière Kwaï ne fait qu’effleurer les atrocités du travail forcé qui était imposé aux prisonniers de guerre par les forces armées japonaises, au mépris des Conventions de La Haye et de Genève. En fait, comme l’écrit l’historien Jean-Louis Margolin, «le chemin de fer Bangkok – Rangoon fut l’épicentre de l’horreur».
Mené dans l’enfer de la jungle montagneuse et marécageuse de la péninsule, le projet avait pour but de relier dans l’urgence les réseaux ferrés thaï et birman, alors que les sous-marins alliés entravaient les voies maritimes. L’objectif stratégique des Japonais est alors de faciliter le transport et le ravitaillement des troupes au nord de la Birmanie, où l’armée nippone affrontait les Britanniques, les Américains et les Chinois.
Pour réaliser cette nouvelle ligne, l’état-major général peut disposer d’une importante main-d’œuvre, corvéable à merci: environ 200 000 «romusha» (travailleurs forcés) asiatiques et plus de 60 000 «soldats-esclaves» occidentaux.
Les détenus sont acheminés par bateaux ou trains entiers, dans des wagons de marchandises, «de véritables cages en fer» où «la chaleur était intenable, entre 40 et 50 degrés», selon le jeune ingénieur Klaas Kooy, qui a subi un voyage de six jours dans de telles conditions. Les prisonniers rejoignent ensuite à pied les camps situés le long du tracé du chemin de fer, lors d’éprouvantes marches forcées sous la pluie et dans la boue: «Certains d’entre nous étaient si épuisés qu’ils ne pouvaient pas se relever. Nos gardes japonais se jetèrent sur eux en hurlant et en leur envoyant des coups de pied», raconte dans ses mémoires le prisonnier hollandais Loet Velmans.
Dans les camps, les conditions de vie sont qualifiées de «très dures» ou d’«atroces». Le logement et l’hygiène sont catastrophiques, la nourriture fait cruellement défaut, le riz est pourri, l’eau insalubre.
Les détenus consomment tout ce qui est vaguement comestible, feuilles et racines, serpents, crabes de terre, petits mammifères... y compris la mascotte d’un régiment britannique. «Il m’est arrivé de manger crus des vers que l’on trouve dans les latrines. Ils n’avaient du reste aucun goût. Absolument pas à recommander!», note avec sarcasme l’officier de cavalerie néerlandais Klaas Kooy, qui n’hésite pas à comparer la situation des cantonnements aux camps d’extermination nazis.
La plupart des travailleurs forcés tombent malades: malaria, choléra, infections diverses. Dans le camp de Hintok, le médecin militaire australien Edward «Weary» Dunlop doit admettre 2882 patients en six mois. Les maladies les plus fréquentes sont le paludisme, la dysenterie et l’entérite.
Violence extrême
Les horaires de travail harassants et la violence des geôliers nippons n’arrange pas l’état de santé des prisonniers. Le Hollandais Loet Velmans est frappé sans raison à coups de marteau dans les reins alors qu’il s’active sur le chantier ferroviaire. Il s’en sort avec une syncope, une hospitalisation puis une affectation à l’infirmerie, ce qui lui sauve probablement la vie.
Même les malades ne sont pas épargnés par les gardiens. Dans un rapport de 1946, le médecin colonel Dunlop écrit: «Au cours des mois les plus sombres du chantier, les malades étaient délibérément persécutés par les contremaîtres. Des hommes aux pieds nus horriblement suppurants étaient contraints à travailler sur des cailloux pointus, ou à traîner des rondins dans une jungle d’épineux.» Des malades sont abandonnés en forêt, d’autres brûlés vifs dans leurs baraquements.
Vision terrifiante
Selon le Singapourien Tan Choon Keng, la vision de ces hommes poussés au bout de leurs forces était terrifiante: «Beaucoup étaient si décharnés, si hagards. (...) Certains devaient utiliser des feuilles de bananier en guise de sarongs.» Loet Velmans confirme: «A 21 ans, je devais ressembler à l’un de ces squelettes ambulants qu’on voit sur les photos de Bergen-Belsen.»
La ligne ferroviaire est achevée en octobre 1943. Mais pour les rescapés, l’enfer physique et psychologique va se poursuivre durant des années. Après la guerre, leur taux de mortalité sera quatre fois supérieur à celui des ex-combattants.
* Jean-Louis Margolin, L’armée de l’empereur – Violences et crimes du Japon en guerre 1937-1945, Editions Armand Colin, 2007.
** Haruko Taya Cook et Theodore Cook, Le Japon en guerre 1931-1945, Editions de Fallois, 2015 (trad. fr.).
Source: Pascal Fleury (Publié le 11.11.2016) - www.laliberte.ch
Un film qui a marqué une génération
Pour les gens de ma génération, il est clair que lorsqu'on évoque « Le Pont de la Rivière Kwai » on pense aussitôt au film de 1957 réalisé par David Lean, mais aussi à la musique du film qui était régulièrement sifflotée dans la rue.
Pendant bien longtemps, ce titre n'évoquait que le film à succès (sept Oscars) que tout le monde connaît (du moins les plus anciens) et rien d'autre. Aujourd'hui encore, on fait plutôt la rapprochement avec le film et c'est bien sûr inévitable.
Malheureusement cette histoire d'un camp de prisonniers perdu quelque part au fond de l'Asie, sans que l'on sache exactement où, était bien réelle.
De nos jours encore, bien nombreux sont ceux qui ignorent où se trouve ce fameux pont de la rivière Kwai et sont souvent étonnés d'apprendre qu'il se trouve en Thaïlande à trois heures de route à l'ouest de Bangkok...
Le colonel Nicholsson (Alec Guiness) n'a probablement jamais existé, le pont en bambou non-plus en tout cas pas dans ce style...
Le film a bien sûr déformé la réalité, c'est courant... technique classique: on se sert d'un cadre et d'une histoire et on arrange tout ça à la sauce hollywoodienne.
A l'époque, l'Asie était si loin… il fallait plusieurs jours pour s'y rendre et c'était un véritable parcours du combattant long et fatiguant. Bien rares étaient ceux qui allaient dans ces contrées pour y faire du tourisme, ce qui ne fit qu'accroître à l'imaginaire du film.
L'écrivain français, Pierre Boulle était loin de penser que son roman obtiendrait un tel succès au cinéma… américain. Ce ne sera d'ailleurs pas le seul succès qu'il connaîtra, puisque quelques années plus tard, il écrira le roman « La Planète des Singes » qui a fait son chemin depuis.
Depuis la sortie de ce film, le titre « Le Pont de la Rivière Kwai », a toujours fait rêver et fait encore rêver. J'ai lu ces jours-ci sur un site anglophone, que de nos jours encore, cette destination reste l'une des priorités, pour bon nombre de touristes arrivant en Thaïlande pour la première fois.
Il n'y a qu'à voir le nombre de touristes marchant sur le pont à Kanchanaburi, se faisant photographier et contemplant l'ouvrage métallique qui n'a rien à voir avec celui du film qui était en bambou…
Les quelques photos que je vous propose aujourd'hui, vous feront découvrir le pont lui-même, mais aussi et surtout la voie ferrée construite sur un long viaduc assez impressionnant adossé aux falaises qui surplombent la rivière Kwai.
Le texte précédent "La Tragédie du Pont de la Rivière Kwai" est assez dur: il ne cherche pas à détruire le travail des réalisateurs et romanciers du film, mais explique à quel point la situation réelle sur place était encore pire que ce que raconte le film...